Journal d’un civil (41) La colère

16 novembre.

Aujourd’hui, je vois passer, pour la millième fois, un tweet sur le thème « mais alors on peut plus critiquer Israël ». Et là, je craque. Fichez nous la paix cinq minutes. Allez critiquer Andorre, la Guinée Bissao ou le Bangladesh. Allez examiner leurs politiques publiques et expliquez-leur comment ils doivent faire, dites-leur ce que vous pensez de leur processus électoral ou du ramassage des ordures dans leur capitale. D’ailleurs, allez leur expliquer, que c’est vous, vu de l’Occident, qui décidez où se trouve leur capitale. Que lorsque vous envoyez un ambassadeur, il n’ira pas dans la ville où se trouve le siège de leur gouvernement (définition d’une capitale), mais dans une autre ville. Je suis sûr que ça les intéressera.

Lire la suite « Journal d’un civil (41) La colère »

Journal d’un civil (40) Les poèmes

Ce matin je me réveille trop tôt. Je n’ai pas assez dormi, j’ai mal dormi. J’ai dû arranger l’appartement pour notre première nuit : je me suis couché tard. Ma fille est malade : elle a pleuré une partie de la nuit. Mon fils est lève-tôt : il est allé jouer dans le salon vers cinq heures moins le quart. Moralité : peu importe la quantité de café que je vais ingurgiter, je sais déjà que ça ne sera pas assez.

Lire la suite « Journal d’un civil (40) Les poèmes »

Journal d’un civil (39) Le changement

14 nov.

Aujourd’hui, enfin, nous déménageons. Vraiment. On ne fait pas semblant comme jusqu’à présent, à trimballer des petits cartons et des sacs bourrés de bouquins. Aujourd’hui on emporte l’essentiel : les lits. Maintenant qu’on a le frigo et internet, les besoins fondamentaux vont être remplis.

A neuf heures et demie, je suis sur le pied de guerre. Ma femme vient de partir avec ma fille, direction le nouvel appartement, pour continuer à le préparer. Je vais dans la chambre, j’ouvre la fenêtre : et voilà que dehors, il pleut des trombes d’eau. Cinq minutes auparavant, rien, maintenant : une pluie drue, verticale et épaisse.

On va rigoler avec les matelas.

Lire la suite « Journal d’un civil (39) Le changement »

Journal d’un civil (38) La patience

Cette semaine est une nouvelle semaine, une semaine qui n’a jamais existé dans l’histoire du monde : essayons d’en faire quelque chose d’intéressant.

Je me lève en essayant de suivre l’antique proverbe hébraïque, en me « fortifiant comme le lion ».

Ce matin, on attend deux choses : le gars qui vient installer Internet dans le nouvel appartement (censé arriver entre midi et quatorze heures) et le gars qui apporte le frigo qu’on a commandé en ligne (entre onze heure et quinze heures).

Comme on est en Israël, les horaires sont là à titre indicatif. Ce qui compte, c’est d’être à côté de son téléphone et plus ou moins dans les parages de l’appartement. Ils vont appeler pour confirmer et demander si on est bien à la maison avant de venir. Le coup de fil peut arriver à n’importe quel moment : y compris à huit heures du matin. Le tout, c’est d’être préparé.

Israël a un rythme très particulier. Les choses peuvent prendre du temps, mais lorsqu’elles arrivent, elles arrivent très vite.

Lire la suite « Journal d’un civil (38) La patience »

Journal d’un civil (36) Shabbat Hayé Sarah

                Nouveau shabbat, sixième shabbat depuis ce jour horrible où tout a basculé. Je me demande quand viendra le temps où je ne penserai plus à compter la distance qui m’en sépare.

                C’est probablement le dernier shabbat que nous passons dans ce qu’il est désormais convenu d’appeler « l’ancien appartement ». Hier soir, on a porté un toast à l’occasion, pour dire à quoi point on a été content de vivre ici, à quel point nous y avons été heureux, mais que nous sommes aussi ravis d’aller ailleurs. Et comme on dit dans le Talmud : makom hadash, mazal hadash : nouveau lieu, nouvelle destinée.

Lire la suite « Journal d’un civil (36) Shabbat Hayé Sarah »

Journal d’un civil (35) Lire

10 novembre.

                Je suis tombé tout à fait par hasard sur un essai de C. S. Lewis qui date de 1939, intitulé Learning in wartime. C’est un sermon qu’il a donné à Oxford en 1939, et qui commence par poser un problème simple : « a university is a society for the pursuit of learning. As students, you will be expected to make yourselves, or to start making yourselves, into what the Middle Ages called clerks: into philosophers, scientists, scholars, critics, or historians. And at first sight this seems to be an odd thing to do during a great war ».

                Sa réponse est intéressante : « The war creates no absolutely new situation: it simple aggravates the permanent human situation so that we can no longer ignore it. Human life has always been lived on the edge of a precipice. Human culture has always had to exist under the shadow of something indefinitely more important than itself. If men had postposed the search for knowledge and beauty until they were secure, the search would never have begun ».

Lire la suite « Journal d’un civil (35) Lire »

Journal d’un civil (34) Le calme

Ce matin, je continue le déménagement et j’amène quatre cartons de livres dans le nouvel appartement. Je m’installe dans mon nouveau coin lecture et je profite un peu du calme. J’entends seulement les voitures qui passent de temps en temps dans la rue de derrière et, dans le lointain, un chien qui aboie sans trop y croire.

Cela fait plusieurs jours qu’il n’y a pas eu d’alerte. Je commence à m’y habituer. Je sens la manière dont, peu à peu, je reprends un comportement normal. Je ne me pose plus de questions à chaque fois que je sors (quel chemin prendre ? Où sont les abris ?). Je ne consulte plus les nouvelles aussi frénétiquement qu’il y a une semaine. Et je me permets même de lire un peu, juste pour le plaisir.

Lire la suite « Journal d’un civil (34) Le calme »

Journal d’un civil (33) Le mental

J’ai des lecteurs formidables. Depuis que j’ai commencé ce journal quotidien, je reçois des messages de soutien et d’encouragement qui font chaud au cœur.

A la suite de plusieurs passages dans mes articles de la semaine dernière, une lectrice m’écrit : « Savez-vous que se réveiller (beaucoup) trop tôt et vouloir que la journée finisse (beaucoup) trop tôt est un signe manifeste de dépression ? »

Elle a raison de soulever la question. Je suis attentif au problème et nous sommes dix millions dans le pays à avoir des hauts et des bas.

En ce qui me concerne j’ai eu un jour de gros bas le premier novembre. Je me suis senti comme au plus profond d’une dépression et j’ai essayé de décrire ce que je ressentais. Mais étrangement, ça n’a duré qu’une journée. Le lendemain, tout allait aussi bien que possible en ces circonstances et depuis, le moral oscille entre bon et excellent.

Lire la suite « Journal d’un civil (33) Le mental »

Journal d’un civil (32) Le rire

Ce matin, j’ai commencé à organiser ma nouvelle bibliothèque. J’ai installé un fauteuil très confortable dans un coin, entre deux meubles, de façon à avoir un endroit cosy où lire et méditer. Je peux aussi attraper des livres sans me lever et poser une tasse de thé à portée de la main : le bonheur.

Toute la question était de savoir quel thème j’allais choisir. Quels livres installer dans cette bibliothèque collée au fauteuil ? La philosophie ? La linguistique ? Les bandes dessinées ? J’ai décidé de revenir aux fondamentaux, au sujet qui m’a occupé pendant mes années d’études universitaires : la littérature française.

Lire la suite « Journal d’un civil (32) Le rire »

Journal d’un civil (31) L’école

6 novembre.

Hosanna ! Sasson ve’simha ! Jour de gloire à Be’er Sheva ! Aujourd’hui, l’école reprend !

Bien sûr, quand je dis « hosanna », je l’utilise dans le sens français du terme. Comment un mot qui, en hébreu, veut dire « de grâce, secours-nous » a mué pour une expression de joie me dépasse totalement. Mais c’est une catégorie linguistique identifiée : des mots dont le sens actuel est l’opposé du sens d’origine. Je me souviens encore d’un de mes professeurs nous détaillant ce phénomène. Le mot qu’il avait utilisé en exemple était « énervé ». Etymologiquement : « privé de nerf, c’est-à-dire mou ». Aujourd’hui le sens est exactement l’inverse : il signifie « excité ».

Bref, l’école reprend.

Lire la suite « Journal d’un civil (31) L’école »