Journal d’un civil (148) Shabbat Ki Tissa

Samedi 2 mars.

Hier, dans la nuit, ma fille a été malade. Elle s’est réveillée en toussant, et la toux a laissé place à plus. Aujourd’hui, c’est au tour de ma femme d’avoir récupéré le mistigri. Elle a été debout une partie de la nuit, et, ce matin, elle est complètement HS.

Les enfants sont en pleine forme. On est samedi matin : pour eux, comme de bien entendu, c’est le moment de courir dans l’appartement en hurlant.

Seulement, dans le nouvel appartement, comme dans l’ancien, l’isolation est de piètre qualité, et les voisins entendent tout, de la même manière que nous entendons tout ce qu’ils font.

La conception de l’immeuble est spéciale : les appartements sont en quiconce. Au dessus de notre salon, il y a la chambre de l’appartement du dessus, et en dessous, la chambre de l ‘appartement du dessous. L’architecte qui a pensé à ça était un génie : ainsi, les voisins peuvent vivre sans arrêt à rebours les uns des autres et s’engueuler à longueur de semaine. Heureusement, cela créé de la rencontre et de la convivialité.

A sept heures trente, je prépare les enfants. Vêtements, manteaux, lunettes. Je prépare le sac. Goûters, bouteilles d’eau, jouets d’extérieur. Et vers sept heures quarante, départ, pour laisser la maman se reposer. On a beau se lever tôt, même pour nous, c’est un peu tôt pour aller jouer dehors.

Premier arrêt : le parc avec les lettres. Il y a des sortes de marelles peintes sur le sol, et les enfants peuvent sauter d’une case à l’autre en épelant l’aleph-bet. Un peu plus loin, le terrain de jeux proprement dit, avec une grande installation qui représente une sorte de jungle. Il y a des escaliers, des passerelles, des tunnels, et tout un tas d’endroits pour monter ou descendre d’un niveau à l’autre. Mais le plus rigolo, ce sont les animaux disséminés sur tout le terrain de jeu. De petit animaux en métal, collés aux endroits les plus improbables. Mon fils est particulièrement fier d’en avoir trouvé un qui ressemble à une « main ». Il ne sait pas à qui appartient la main en question, alors je lui explique qu’il s’agit d’une empreinte d’ours.

Une fois qu’on a trouvé tous les animaux, départ pour un deuxième parc. Comme je m’ennuie assez rapidement dans ces endroits, je les emmène d’un lieu à un autre pour avoir un peu de dépaysement.

Cette fois, le jeu principal est une sorte de grande toile d’araignée verticale, qui permet de monter sur une plate-forme, de laquelle on peut descendre en tobogan.

Mais, plus intéressant pour moi, on trouve à côté une boite à livres, dans laquelle, selon ma femme, il y a de nouveaux livres français. J’en profite donc pour regarder ce qu’il y a, et effectivement, il y a quelques ouvrages intéressants, dont un livre de Gérard de Nerval et ce qui ressemble à une édition originale d’un Romain Gary.

Le terrain de jeu se trouve à côté d’un abris anti-bombes, qui est devenu, depuis peu, également une synagogue. C’est une synagogue un peu itinérante, qui louait jusqu’à présent un local sur le campus qui se trouve non loin de là. Visiblement, ils ont un nouveau port d’attache. La mairie aime bien mettre des synagogues dans les abris : c’est une bonne synergie. Ca permet d’avoir quelqu’un qui s’occupe des lieux et qui surveille, et ça donne de la superficie facilement à des groupes qui en ont besoin.

Vers neuf heures, c’est l’heure d’aller à notre synagogue. Ce n’est pas très loin, mais la poussette est lourde étant donné tout le bazar que j’ai emporté. J’ai largement surestimé le temps nécessaire : j’y suis en à peine un quart d’heure. Qu’à cela ne tienne, les enfants partent pour la troisième aire de jeu de la matinée.

Ma fille est scotchée à la balançoire, tandis que mon fils essaye d’aller jouer avec d’autres enfants plus âgés que lui, qui n’ont visiblement pas trop envie d’être avec un petit.

Enfin, on voit les amis qui commencent à arriver. Ma fille abandonne, à contrecœur, la balançoire, et on s’installe dans la cour, où a lieu l’office des enfants. Il y a une bonne vingtaine de participants, et la personne qui dirige l’activité est appréciée de tous. On commence par la prière, puis quelques chansons, et on termine par une histoire. Cette semaine, l’histoire de Rabbi Binyamin, qui avait donné la charité à une veuve, et qui tombe ensuite malade. J’aime beaucoup ces histoires simples : le niveau d’hébreu correspond à peu près au mien, j’ai l’impression de progresser !

Vers dix-heures et quart, distribution de goûters, et jeux (ça commençait à manquer). Je discute un peu avec les autres parents, mais je commence sérieusement à fatiguer. Une demi-heure plus tard, retour au bercail.

Ma femme dort toujours. Les enfants déjeunent, et, chose exceptionnelle, tout le monde fait la sieste. Mon fils s’endort sur la canapé à côté de moi pendant une bonne heure et demie.

La fin de l’après-midi passe au ralenti. Je suis épuisé. Je mets ça sur le compte de la matinée qui a été assez chargée, mais, vers vingt-et-une heure, je découvre que la raison était tout autre : après être passé par ma fille et ma femme, le virus a décidé de venir me rendre ses hommages. Joie.

  • Fin du 149ème jour, 2 mars 2024, 22 adar I 5784.