Mercredi 7 février.
L’actualité n’est pas linéaire. Il y a des moments lents, où on regarde les arbres pousser (c’est la saison des marronniers), et d’autres où tout accélère, comme s’il y avait un nœud sémantique vers lequel tout convergeait soudain.
Aujourd’hui est un jour de ce style.
On a appris hier que 31 (ou 32 selon les sources) otages étaient décédés. Leurs noms n’ont pas encore été publiés, mais les familles ont été prévenues avant que la chose ne soit rendue publique. Cela fait un moment qu’un doute existait à ce sujet, mais on n’a pas encore les détails de la manière dont l’armée a fait cette découverte macabre.
On a également enfin eu vent de l’accord proposé par le hamas. Selon un document reçu par Reuters, les grandes lignes de l’accord seraient les suivantes :
🔹135 jours de cessez-le-feu (quatre mois et demi)
🔹3 phases de 45 jours chacune
🔹échange les otages contre des prisonniers palestiniens
🔹début de la reconstruction de Gaza, retrait total des troupes israéliennes, échange des corps
🔹durant la première phase, toutes les femmes, tous les hommes de moins de 19 ans, les personnes âgées et les malades seraient libérés.
🔹les otages hommes qui restent seraient libérés dans une seconde phase.
🔹1 500 prisonniers seraient libérés des prisons israéliennes, dont un tiers choisi par le hamas parmi des prisonniers condamnés à vie.
🔹500 camions seraient autorisés à passer par jour.
Un officiel israélien a déclaré, sous couvert d’anonymat : « Il s’agit d’un document détaillé qui fait référence à toutes les sections de l’ébauche proposée. Nous étudions les détails et vérifions si et comment nous pouvons entamer des négociations ». Un autre officiel israélien a déclaré à la chaîne 12 : « le sens de la réponse du Hamas est un refus de traiter ».
On apprend également qu’il y a des avancées sur le front nord. Selon un article publié sur le site axios :
« La proposition est basée sur le modèle des accords « Raisins de la colère » de 1996 entre Israël et le Hezbollah qui ont été déclarés par les États-Unis et d’autres puissances mondiales pour mettre fin à l’opération militaire israélienne au Liban à l’époque.
🔹Les sources ont indiqué que les nouveaux accords ne seraient pas officiellement signés par les parties, mais que les États-Unis et quatre alliés européens – le Royaume-Uni, la France, l’Allemagne et l’Italie – publieraient une déclaration détaillant les engagements que chaque partie a accepté de prendre.
🔹Les cinq puissances occidentales annonceront également des avantages économiques pour stimuler l’économie libanaise afin d’adoucir l’accord pour le Hezbollah, ont indiqué les sources.
🔹Les deux parties s’engageront notamment à mettre fin aux escarmouches frontalières qui ont lieu depuis l’attaque du Hamas contre Israël, le 7 octobre.
🔹Les accords ne devraient pas exiger du Hezbollah qu’il déplace toutes ses forces au nord du fleuve Litani, comme le demande la résolution 1701, mais seulement à huit ou dix kilomètres de la frontière israélienne, ont précisé les sources. »
Commentaire de Zineb Riboua, une spécialiste de la région : « It’s fascinating how there is an echo-chamber about how the Biden administration is supporting Israel when in reality they are cutting deals left and right with groups that only want its total annihilation ».
Aujourd’hui est également la cinquième visite de Blinken dans la région. Il arrive en Israël après s’être rendu en Arabie Saoudite, en Egypte et au Quatar.
Durant sa conférence de presse, Blinken a déclaré que les Saoudiens sont toujours intéressés par la normalisation. Il a jouté que certains pays dans la région « prêts à faire des choses avec et pour Israël qu’ils n’ont jamais été prêts à faire dans le passé, y compris des mesures qui permettraient de mieux répondre aux préoccupations de sécurité qu’ils pourraient avoir. »
On lui a demandé s’il voyait le hamas jouer un rôle dans la gouvernance de Gaza après la guerre. Il a répondu : « la réponse courte est non ».
Concernant l’UNRWA, il a déclaré qu’il était impératif d’enquêter sur la possible participation de certains membres du personnel aux attaques du 7 octobre, mais que les fonctions de l’UNRWA devaient être préservées.
Concernant l’autorité palestinienne, il a déclaré : « l’Autorité Palestinienne doit prendre des mesures pour « se réformer et se revitaliser ». »
Commentaire lapidaire de Lahav Harkov, journaliste israélienne : « C’est tout ce qu’il fallait faire ? Pourquoi est-ce que personne n’a essayé avant ? »
Blinken a aussi déclaré : « Le 7 octobre, les Israéliens ont été déshumanisés de la manière la plus horrible qui soit. Depuis, les otages ont été déshumanisés tous les jours. Mais cela ne peut pas être une autorisation pour déshumaniser les autres. »
Commentaire de Michael Oren, ancien ambassadeur d’Israël à Washington : « lorsque le secrétaire d’État Blinken accuse Israël – de manière inexacte, injuste et diffamatoire – de déshumaniser les Palestiniens, il nous déshumanise et contribue à la délégitimation d’Israël et à la diabolisation des Juifs dans le monde entier. Merci, Monsieur le Secrétaire Blinken, de nous réapprovisionner en munitions et de défendre notre droit à l’auto-défense, mais sans légitimité, il nous sera difficile d’utiliser ces munitions ou d’exercer ce droit. En nous déshumanisant, vous mettez en péril notre sécurité, voire notre existence ».
Concernant l’accord avec le hamas à propos des otages, Blinken a déclaré : « Bien que la réponse du Hamas contienne des points évidents qui bloquent un début de négociation [some clear non-starters], nous pensons qu’elle crée un espace pour parvenir à un accord. Et nous y travaillerons sans relâche jusqu’à ce que nous y parvenions. »
Benjamin Netanyahou a également donné une conférence de presse. Il a déclaré que si le hamas est défait, « le cercle de la paix grandira ». Concernant le jour d’après, le premier ministre « essaie de recruter des acteurs régionaux pour contribuer à cette future gouvernance civile, mais il ne croit pas que cet effort sera couronné de succès tant qu’il ne sera pas clair que le Hamas est vaincu ». (source ToI)
Netanyahou revient également sur un point étrange de la visite de Blinken. Ce dernier voulait s’entretenir avec le chef d’état-major en privé. L’entretien n’a finalement pas eu lieu. Le premier ministre a déclaré à ce sujet « qu’il ne pense pas que cela aurait été approprié et que lui-même ne rencontre pas de commandants militaires sans la présence de dirigeants politiques lorsqu’il visite les États-Unis ou d’autres pays ».
A propos de l’accord potentiel avec le hamas, il a déclaré : « Il est censé y avoir une certaine forme de négociation par le biais des intermédiaires. Mais pour l’instant, d’après ce que je vois de la réponse du Hamas [au cadre de négociation soutenu par Israël], on est loin d’y être ».
Concernant l’évolution du conflit, il a déclaré : « nous sommes sur la voie d’une victoire complète. La victoire est à portée de main », déclare-t-il, prédisant que la guerre sera gagnée en « quelques mois » et non en plusieurs années ou décennies. Il rappelle les objectifs de la guerre : détruire le Hamas, rendre les otages et faire en sorte que Gaza ne constitue plus une menace pour Israël, et il affirme que les FDI agissent « systématiquement » pour atteindre ces objectifs. » (source ToI)
Il ajoute également : « 20 000 combattants du Hamas sont morts ou blessés, soit plus de la moitié de la force de combat du Hamas, 18 bataillons sur 24 n’étant plus opérationnels. Il ajoute que les forces de défense israéliennes détruisent systématiquement le réseau souterrain où se cache le Hamas. » (source ToI).
Dans une toute autre sphère géopolitique, Vladimir Poutine a rencontré le grand rabbin de Russie, Berl Lazar. Il a déclaré : « Comme on le sait, notre ministère des Affaires étrangères a travaillé par l’intermédiaire de l’aile politique du Hamas et, dans l’ensemble, il y a eu des résultats spécifiques. » Le Times of Israel amène le contexte nécessaire : « Poutine ne développe pas, selon les commentaires rapportés, mais en effet l’un des otages libérés en novembre – le double national russo-israélien Roni Krivoi – a été présenté comme un geste du groupe terroriste envers Poutine. »
Enfin, une ancienne candidate à la présidence américaine, essaye d’exister en faisant une déclaration absurde. Accueil las des Israéliens. Un lecteur commente : « Thanks for the advice, Ma’am, but that’s a matter for Israeli voters ». Une idée qu’on ferait bien de rappeler souvent à Washington. Israël est un pays libre et souverain, et nous décidons nous-même de qui nous gouverne et quelles politiques nous menons. Nous sommes heureux d’être soutenus, nous sommes plein de gratitude envers nos alliés et les efforts qu’ils nous consacrent, mais à la fin de l’histoire, nous décidons de la manière dont nous organisons notre pays et sa destinée.