Journal d’un civil (61)

Mercredi 6 décembre.

Aujourd’hui, je me sens extrêmement las. La fatigue physique est telle que même après deux mugs de café, j’ai encore du mal à me lever et a avancer.

La journée d’hier a été assez éprouvante.

Ça a commencé à sept heures avec une alerte. Toute la famille en pyjamas sur le palier. Beaucoup d’explosions, au moins une vingtaine, très fortes. Les tirs de barrage reprennent donc bel et bien.

Après quelques minutes nous sommes rentrés et l’appartement embaumait le pain grillé qui venait de sortir du toaster. (Gloire éternelle soit rendue à l’inventeur du toaster, le signe évident d’une société civilisée).

Comme les alertes reprennent sur Be’er Sheva, la mairie réévalue le niveau d’alerte, comme chaque jour. Et aujourd’hui, ça n’est pas clair si l’école a lieu ou pas. Finalement si, il y a école et il y a également le transport. Mais quelques minutes plus tard, non pas de transport. Mais en fait si. On décide d’emmener notre fils par nos propres moyens.

Nous avons travaillé tout le matin pour terminer le déménagement. On a chargé une voiture avec les dernières affaires, on a nettoyé, nettoyé, nettoyé, et enfin, à midi, c’était l’heure de rendre les clés.

L’agent de la propriétaire vient pour faire l’inspection. Il passe beaucoup de temps à vérifier si les ampoules fonctionnent (?) et si les clous dans les murs étaient là initialement (??). Puis il cherche les choses défectueuses, et j’explique que je voulais repeindre une chambre, mais que je n’ai pas eu le temps. Il dit que je peux garder les clés quelques jours de plus si je veux. J’accepte.

On repart avec deux poussettes chargées, et enfin, on est libres. Ou presque. Parce que maintenant il faut décharger la voiture et aller chercher mon fils. Le tout alors que la pluie commence à tomber.

Avec un tel programme hier, pas étonnant que ce matin je sois complétement HS aujourd’hui. Et pourtant je suis censé aller peindre la chambre !

Vers dix heures trente ma femme revient de son rendez-vous et on part faire quelques courses. On achète de l’enduit pour reboucher les trous des clous, et on passe à l’ancien appartement pour bricoler quelques minutes. Je laisse toutes les affaires de peinture : ce sera pour demain.

Vers quinze heures, nouvelle alerte. Une dizaine de missiles lancés sur Be’er Sheva. Encore un tir de barrage. Les enfants commencent à prendre le pli. Lorsque l’alerte résonne, ils se lèvent, et partent tranquillement vers la porte d’entrée. Il faut les cornaquer un peu, mais une fois sur le palier tout le monde commence à prendre ses marques. A ceci près que tout le monde est pieds nus : dans l’appartement il y a des tapis dans le salon, mais, maintenant que la saison fraîche arrive, le contraste avec le carrelage du pallier est particulièrement saisissant.

Ce soir, ma femme ne travaille pas. On met les enfants au lit, et enfin, on peut souffler cinq minutes. On essaye de commander des sushis, mais l’appli ne fonctionne pas. Au moment de valider la commande, il n’y a pas de bouton pour payer ! On se rabat sur notre restaurant préféré, un restaurant indien qui prépare une cuisine authentique, Be’er Sheva ayant une grosse communauté indienne.

On s’installe dans le canapé, on met un film, et voilà, enfin, deux mois après avoir pris la décision de changer de lieu, on est enfin chez nous. Bonne soirée. – Fin du 61ème jour, 6 décembre 2023, 23 kislev 5784.