Journal d’un civil (172) Les Bersabéens

Mardi 27 mars.

Ce soir, je retrouve un petit coin de France. Il est situé au cœur de Be’er Sheva, dans un centre communautaire réservé pour l’occasion.

L’équipe de l’alyah a organisé une soirée pour permettre aux francophones de la ville de se rencontrer et de commencer un nouveau groupe.

Il y a eu, pendant longtemps, un centre culturel français à Be’er Sheva. Dans les boîtes aux livres de la ville, je trouve régulièrement des ouvrages avec son tampon. Mais les budgets ont diminué et le centre culturel a fermé. Plus de cours de français, plus de bibliothèque, plus de liens.

Les Français ont beaucoup de mal à s’organiser. Le contraste avec les Américains est frappant : la communauté anglo de Be’er Sheva est extrêmement dynamique. Il y a des groupes dans tous les coins, chacun avec sa spécialité, chacun avec sa cible. Jules Verne parlait déjà de phénomène au début de De la Terre à la Lune : « Or, quand un Américain a une idée, il cherche un second Américain qui la partage. Sont-ils trois, ils élisent un président et deux secrétaires. Quatre, ils nomment un archiviste, et le bureau fonctionne. Cinq, ils se convoquent en assemblée générale, et le club est constitué. »

Les Français n’ont pas cette tendance. Plus individualistes, plus prompt à être en petits groupes isolés. Il faut une force centrifuge pour les organiser, et, ce soir, on a peut-être réamorcé celle-ci.

A dix-neuf heures les enfants dorment ; je pars à pied. D’après le plan, c’est plus rapide d’y aller ainsi que de prendre le bus. La sciatique me tire un peu, mais prendre l’air me fera du bien. A dix-neuf heures trente, j’arrive au centre communautaire, une structure qui ressemble un peu à une salle des fêtes, en mieux. Chaque quartier en a un, et ce n’est pas la première fois que je vais à un événement organisé dans une structure de ce type.

Ruth, l’organisatrice, me donne un autocollant avec mon nom, et m’indique où se trouve ma table. On est reparti plus ou moins par quartier ou par groupes d’âge, ce qui permet de rencontrer d’autres personnes avec qui on partage un ou plusieurs points communs.

Dans le fond de la salle, un grand buffet, avec de quoi faire du thé et grignoter. Je prépare un thé à la menthe et je vais m’asseoir avec mes acolytes du jour.

On est six autour de la table. La première activité consiste à se présenter. On dit en quelques mots qui est où, d’où on vient, ce qu’on fait et où on habite. Ça paraît simple, mais, quand on est immigrant, ça n’est jamais simple. Chaque histoire est un tiroir qui s’ouvre sur d’autres tiroirs. Même en simplifiant au maximum, la mienne prend cinq minutes au bas mot.

Une fois les présentations faites, on passe aux choses sérieuses : les chansons.

Le chanteur pour ce soir s’appelle Avshalom. Il habite dans un kibboutz situé en bordure de Gaza, mais, pour le moment, il est déplacé à Be’er Sheva. Il dit : « en Israël, on m’appelle Avshalom, mais ma famille et mes amis m’appellent Maurice ». Lui aussi a une histoire constituée de multiples tiroirs. Il explique qu’il est né au Vénézuela, de parents qui venaient du Maroc et d’Algérie. Il a grandi comme les Goscinny : dans une famille francophone, en fréquentant une école française.

Quelqu’un dans l’assistance lui dit : « vous parlez très bien français ! »

Il répond : « mais c’est ma langue maternelle ! »

Quelqu’un d’autre demande : « d’où en Algérie ? »

Il dit : « Oran ».

Les Oranais dans l’assistance applaudissent.

Avshalom-Maurice fait remarquer : « les Oranais, c’est les vrais ! » Et il ajoute en riant : « Pas comme ceux de Mostaganem ».

Je n’ose rien dire : une partie de ma famille vient de Mostaganem !

Il s’assied ; il tient sa guitare à l’espagnole, le manche haut. Il dit : « on m’a dit de préparer trois chansons, mais j’en ai plus. On a tout notre temps ».

Il commence par une chanson de Bourvil : Salade de fruits. Tout le monde reprend le refrain en chœur.

Il explique ensuite qu’il y a un chanteur qu’il aime beaucoup : Moustaki. En plus, ajoute-t-il, « il est de chez nous, il vient d’Egypte ».

Quelqu’un dans l’assistance : « il faut pas oublier Aznavour ».

Quelqu’un d’autre : « mais il est pas de chez nous ».

Le premier : « il est pas d’Oran ? »

Eclats de rire dans la salle. La soirée commence bien.

Avshalom chante Ma Liberté, que je n’ai pas entendue depuis si longtemps. Je ne l’ai même pas entendue de la bouche de Moustaki, dont j’avais vu l’un des derniers concerts. Il ne l’avait pas chanté, en dépit de l’insistance du public et des rappels : sa liberté, jusqu’au bout.

Il termine par quelques tubes d’Enrico.

Quelqu’un demande : « Macias ? »

Il dit : « mais qui d’autre ? »

Les chansons d’Enrico ne sont jamais aussi belles que lorsqu’elles sont accompagnées à la guitare, simplement.

Le moment musical terminé, on passe au moment jeu. Ce soir, le quizz porte sur Be’er Sheva, sa vie, son œuvre.

Chaque table forme un groupe, et, grâce à une application, les résultats sont donnés en direct sur l’écran de l’ordinateur, projeté sur le mur.

Vingt questions, certaines assez pointues, pour passer en revue les différents domaines de la ville.

Mon équipe est en deuxième place au début, et puis, après cinq/six questions, on décolle, et on reste en première place jusqu’à la fin.

Pour nous féliciter, les organisateurs nous remettent un prix : deux places par personne pour aller au Midbarium, le zoo de Be’er Sheva, dont tout le monde dit le plus grand bien.

A la sortie, on nous donne également un paquet de friandises, sur lequel a été collé un QR code pour rejoindre le groupe fraîchement créé des Français de Be’er Sheva. Tout le monde a l’air ravi de sa soirée. Vivement la suivante !

– Fin de la 172ème journée, 26 mars 2024, 16 Adar II 5784.

Trivia sur la ville de Be’er Shéva

  1. Quel est le nombre d’habitants de Be’er Shéva ?
    a. 255 000
    b. 175 000
    c. 165 000
    d. 215 000
  2. Combien de quartiers compte la ville de Be’er Shéva ?
    a. 14
    b. 17
    c. 20
    d. 25
  3. Quel est le plus vieux quartier de Be’er Shéva ?
    a. Schrouna Aleph
    b. La vieille ville
    c. Shikoun Darom
    d. Schrouna Guimel
  4. Comment s’appelle le précédent maire de Be’er Shéva ?
    a. Yitzhak Rager
    b. Yaakov Turner
    c. David Tuviyahu
    d. David Bonfeld
  5. Quelle est l’origine du nom de la ville de Be’er Shéva ?
    a. Les sept puits d’Avraham
    b. Les puits creusés par Yitzhak
    c. Les sept moutons donnés à Avimélekh
    d. L’alliance faite entre Avraham et Avimélekh
  6. Quel est le prophète qui a nommé ses fils juges dans la ville de Be’er Shéva ?
    a. Samuel
    b. Ovadia
    c. Yéhézkael
    d. Jérémie
  7. Le musée des soldats de Anzac raconte l’histoire de ces soldats qui ont aidé à la libération de Be’er Shéva en 1917. Mais qui sont ces soldats ?
    a. Des Australiens et des Américains
    b. Des Australiens et des Néo-Zélandais
    c. Des Britanniques et des Français
    d. Des Britanniques et des Néo-Zélandais
  8. Qui était à la tête des soldats lors de la conquête de Be’er Shéva en 1917 ?
    a. Yosef Trumpeldor
    b. Le Général Allenby
    c. Le Général Eisenhower
    d. Le Général Patton
  9. Hapoel Be’er Shéva est un club de football de ligue nationale. En quelle année fut créé le club ?
    a. 1949
    b. 1954
    c. 1961
    d. 1963
  10. Combien de fois Hapoel Be’er Shéva a gagné le championnat national de football ?
    a. 2 fois
    b. 3 fois
    c. 4 fois
    d. 5 fois
  11. Quel est le nom du prix attribué à la ville de Be’er Shéva pour la création de fontaines dans l’espace public ?
    a. Prix du design
    b. « La ville des jardins »
    c. « La ville d’eau »
    d. « La ville des fontaines »
  12. Comment s’appelle le musée des sciences pour enfants à Be’er Shéva ?
    a. Le Park Carasso
    b. Le musée du Négev
    c. La Lunada
    d. Le Musée des enfants
  13. L’amphithéâtre de Be’er Shéva qui se situe au Parc Nahal est le plus grand du pays.
    Combien peut-il recevoir de spectateurs ?
    a. 6000 spectateurs
    b. 8000 spectateurs
    c. 10000 spectateurs
    d. 12000 spectateurs
  14. Savez-vous que le premier lycée créé en Israël se trouve à Be’er Shéva ? De quel lycée s’agit-il ?
    a. Mékif Aleph
    b. Mékif Rager
    c. Mékif Tuviyahu
    d. Mékif Amit
  15. En 1979 la ville de Be’er Sheva a reçu la visite historique d’un président d’état étranger. De qui s’agit-il ?
    a. Jimmy Carter
    b. Anouar Sadate
    c. Valéry Giscard D’Estaing
    d. Habib Bourguiba
  16. Quel est le premier centre commercial (canyon) de Be’er Sheva ?
    a. Canyon Shaul hamelekh
    b. Canyon Avia
    c. Canyon Haneguev
    d. Canyon Kiriyat Hamemshala
  17. Quel est le chanteur célèbre natif de Be’er Shéva ?
    a. Moshé Peretz
    b. Lior Narkisse
    c. Amir Bénayoun
    d. Shimi Tavori
  18. Combien de fois Ruvik Danilovich a été élu maire de Be’er Shéva ?
    a. 2 fois
    b. 3 fois
    c. 4 fois
    d. 5 fois
  19. L’hôpital Soroka est le grand plus employeur du Négev. Combien compte-t-il d’employés ?
    a. 2800
    b. 3200
    c. 4200
    d. 4800
  20. Quels sont les animaux qui ont fait leur « alyah » de France au Midbarium de Be’er Shéva ?
    a. Les guépards
    b. Les rhinocéros
    c. Les léopards
    d. Les crocodiles

Réponses dans l’article de demain !