Journal d’un civil (138) Le dentiste et la kiné

Mercredi 21 février.

Aujourd’hui, les rendez-vous médicaux se bousculent au portillon.

Ce matin, je dois emmener mon fils chez le dentiste. Premier rendez-vous de ce type en ce qui le concerne (le fils, pas le dentiste). Cela fait plusieurs jours qu’on le prépare en lui expliquant ce qu’il va se passer, mais il n’a pas vraiment l’air inquiet. A sept-heures quarante-cinq, tout est prêt ; on prend le bus qui nous emmène à quelques mètres seulement du rendez-vous.

Les dentistes se trouvent dans un centre médical de notre caisse de santé. Au premier étage, tournez à gauche, et voilà les bureaux et les salles de soin. Comme d’habitude, on est accueilli par une machine, dans laquelle je passe la carte magnétique de mon fils. Mais voilà que rien ne sort. La machine dit en substance qu’elle ne peut pas imprimer.

La secrétaire me dit : vous avez rendez-vous à quelle heure ?

Huit heures et demie.

Elle vérifie, elle acquiesce. « Pas besoin de numéro aujourd’hui, c’est en salle 4 ».

On s’assied, on patiente. La patiente avant nous est une petite fille un peu plus âgée que mon fils, qui est venue avec sa mère. Vers huit heures vingt, c’est son tour. Après cinq minutes de consultation, on entend pleurer de l’autre côté de la porte. Mon fils se tourne vers moi et me demande : c’est quoi ?

Je fais comme si je n’avais rien entendu, mais il insiste : c’est quoi ce bruit ?

Je fais mine d’écouter, et je dis : on dirait un bébé, peut-être qu’il y en a un dans une autre salle.

Il me dit : mais la petite fille, elle va bien ?

Je fais un geste de la main pour éluder le sujet. Oui, bien sûr qu’elle va bien.

Cinq minutes plus tard, la petite fille ressort, elle a l’air d’aller bien. C’est notre tour.

Le dentiste parle à une cadence infernale. J’ai à peine le temps de comprendre les cinq premiers mots qu’il est arrivé à la fin du paragraphe. J’ai préparé mon fils au rendez-vous, mais c’est moi que j’aurais dû préparer. Je me rends compte que je n’ai strictement aucun vocabulaire sur les problèmes dentaires. Je ne sais même pas dire « carie » ! (Ce que je sais pourtant lire en japonais* : bienvenue dans le bazar linguistique qu’est ma tête).

Le dentiste et son assistante installent mon fils sur le fauteuil, et voilà qu’il découvre, mirabile visu, qu’il y a, au-dessus de sa tête, une fois allongé, un écran de télé, et que sur cet écran de télé, il y a les Schtroumpfs ! (Les « dardassim » : très populaires en Israël).

Le rendez-vous se passe bien, les dents sont en parfaite santé : mon fils repart avec un petit jouet qu’il a choisi dans un bac rempli de cadeaux pour les enfants.

Il faut maintenant prendre le bus en sens inverse, et aller au gan. Le bus est censé arriver bientôt. Cinq minutes passent, dix minutes, quinze, vingt : enfin il arrive. On essaye de monter par la porte du milieu : elle ne s’ouvre pas. Tout le monde doit descendre par l’avant, tandis que les nouveaux passagers essayent de monter en même temps. Lorsque le bouchon a été résolu, on s’installe, et voilà qu’on ne peut pas s’empêcher de noter qu’il y a un bruit, un bruit très énervant, un bruit de sonnerie qui produit un bip tout à fait irritant à intervalles réguliers d’une seconde et demie. Bip bip bip bip bip…

Le bus avance en cahotant. On n’est pas très loin, le gan est à peine à deux kilomètres. Si tout va bien, c’est l’affaire d’une dizaine de minutes.

Mais tout ne va pas bien. Arrivé à mi-chemin, le conducteur descend de son siège et nous dit : il y a une panne, vous devez prendre le suivant.

Ça commence à devenir une habitude sur cette ligne (cf l’épisode où je suis allé à Tel Aviv).

On descend, on attend. Une minute, deux minutes, trois minutes. Enfin un autre bus se pointe. Tout le monde se précipite, de crainte qu’il ne décide, lui aussi, de ne pas repartir.

Mais non, cette fois c’est la bonne.

Je dépose mon fils au gan, et je repars en sens inverse. Il est un peu moins de dix heures, cela ne fait que deux heures qu’on est parti. Deux heures, pour un rendez-vous qui aura duré une vingtaine de minutes, le ratio n’est pas aussi terrible qu’on pourrait croire.

Je m’arrête à la maison, je mange une bolée de pates, et je repars pour le deuxième rendez-vous médical : le kiné.

A nouveau, il faut attendre le bus. Ce matin je devais prendre le 16, je ne voyais que des 9. Maintenant que je dois prendre le 9, il n’y a que des 16 qui passent. Le trajet dure une dizaine de minutes, mais je n’ai prévu que 45 minutes de marge, est-ce que ça va être suffisant ?

Ça va l’être.

Mais le rendez-vous est à 12h01 et j’arrive à 11h59. Autrement dit : ric-rac.

Pas très grave : la kiné est en retard. Elle arrive à 12h02, et passe à l’accueil. Elle demande à ses patients pourquoi on n’est pas dans la salle de sport. Quelqu’un dit que c’est fermé. Elle demande à la secrétaire quel est le code pour ouvrir la salle, et je ne peux m’empêcher d’entendre le code, qui est, comme souvent dans ces cas-là, d’une stupidité complète. Ce qui, en réalité, pose la question de la nécessité d’un code pour entrer. Pour protéger les lieux de quelqu’un qui voudrait venir faire de la rééducation en douce et profiter des medecine balls et des barres de fer de deux kilos ?

Aujourd’hui je commence par le vélo elliptique, et je dois dire que ça commence en entrer. Etirements, dans un sens, dans un autre. La sciatique me fait mal, mais les exercices sont plus faciles. La kiné me demande comment ça va, si c’est facile ou pas, et j’essaye d’expliquer, mais, à nouveau, je me rends compte que mon vocabulaire médical est complétement à plat pour parler des problèmes que j’ai.

Il va falloir que je me fasse quelques fiches de vocabulaire sur le sujet, parce que ça commence à devenir fatigant.

Premier mot : « carie ». Il va falloir que je prenne un rendez-vous chez le dentiste.

  • 虫歯 littéralement « insecte / dent ».
    – Fin du 138ème jour, 21 février 2024, 12 adar I 5784.