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Olivier F. Delasalle
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Olivier F. Delasalle

Des Japonais à Jérusalem

OFD, 3 November 20253 November 2025

C’est un groupe étonnant : un groupe de Japonais sionistes. Un groupe que les Hiérosolymitains connaissent souvent de façon un peu confuse. On les voit une fois par an faire une parade au moment de Soukkot, et de temps en temps au Kotel. Lorsqu’ils s’y rendent en groupe, au moment de leur pèlerinage annuel, ils sont habillés avec une tenue bleue qu’on ne peut pas louper. Parfois ils viennent même en tenue traditionnelle, en kimono. Ce groupe, ce sont les Makuya. Portrait d’un mouvement né en même temps qu’Israël et ami d’icelui depuis.

Le quartier de Givat HaMivtar est un petit quartier paisible de Jérusalem. On s’y promène à l’ombre des arbres, bordé par les maisons en pierre dorée. Au détour d’un rue à flanc de colline, on tombe sur un portail discret, et une pancarte qui dit simplement : « centre Makuya ».

On pousse le portail et on est transporté dans une autre endroit, à quelques milliers de kilomètres. C’est un petit coin de Japon à Jérusalem : le jardin est planté de bambous et parsemé de pierres élégantes. A l’entrée, on enlève ses chaussures et on enfile de petits chaussons.

Au rez de chaussée, une grande salle, où l’on a construit un espace pour la cérémonie du thé. On trouve également une cuisine et les appartements du directeur. Comme la maison est construite en appui de la colline, le sous-sol se trouve être également ouvert sur l’extérieur.

On descend un petit escalier, on slalome entre les installations, et on croise des petites pancartes en japonais, d’autres en hébreu. Enfin on débouche sur le lieu principal : la grande salle de réunion, qui est aussi bordée de livres, une bibliothèque de plusieurs milliers de livres, en japonais, en hébreu et même en grec.

Une gigantesque calligraphie est installée sur l’un des murs. A côté, un drapeau israélien et un drapeau japonais. Et à la place d’honneur, une photo de la famille impériale.

Un centre à Jérusalem, les Makuya en ont rêvé pendant des années. Et c’était finalement une étape logique sur leur parcours. L’endroit sert aux étudiants qui viennent du Japon pour étudier à l’université hébraïque. C’est également un lieu de réunion et de prière. Mais il sert aussi de centre culturel pour faire découvrir la culture japonaise aux habitants du quartier et de la ville. Ateliers origami, rencontre avec les étudiants en langue japonaise de l’université, conférences, cérémonie du thé, c’est un pont en construction entre Tokyo et Jérusalem.

Alors qui sont les Makuya ? Et comment sont-ils arrivés dans ce coin du monde, à un moment où tout poussait les Japonais à aller dans un sens contraire ?

Pour comprendre cela, il faut au préalable connaître quelques éléments d’histoire japonaise. Car leur histoire s’insère dans une perspective plus large, celle de l’arrivée au Japon du christianisme, et donc, indirectement, de la Bible et de la culture hébraïque qui lui a donné naissance.

Après deux siècles d’isolement et de fleurissement culturel, le Japon est forcé par les Américains d’ouvrir ses frontières au milieu du dix-neuvième siècle. S’en suit une période troublée dans l’archipel, qui finit par un changement politique majeur : l’empereur, qui n’était plus qu’une figure symbolique et qui avait été remplacé par une figure militaire, le shogun, reprend la main et règne à nouveau totalement. C’est le début de l’ère Meiji.

Le sujet ? Moderniser le pays, et lui faire rattraper le retard phénoménal qu’il a sur l’occident, retard qui a forcé le Japon à capituler aux demandes américaines face aux bateaux, et aux canon, du commandant Perry.

La stratégie adoptée ? Etudier l’occident et s’approprier tout ce qu’il est nécessaire de s’approprier. Le succès est éclatant : en quelques décennies, le Japon rattrape l’occident et bat même la Russie lors de la guerre de 1905, prouvant qu’il était désormais dans le camp des grandes puissances.

Parmi les innombrables choses que les Japonais ont importées, on trouve le christianisme. Essentiellement dans ses différents versions protestantes, les missionnaires américains étant particulièrement intéressés à évangéliser ce pays qui leur avait été fermé pendant deux cents ans. D’autant plus que l’une des raisons de la fermeture avait été un conflit entre les japonais chrétiens et le pouvoir central. Et le succès semble au rendez-vous à la fin du dix-neuvième, à tel point que tous les missionnaires sont persuadés que bientôt, l’archipel sera chrétien.

C’est aller un peu vite : la fin du XIXème connaît un renouveau religieux dans l’ensemble du pays, le christianisme étant un exemple particulier d’un phénomène plus large. Il attire principalement les élites urbaines, qui sont intéressées par son aspect éthique, tout en y voyant l’une des clé du succès occidental. A l’inverse, dans les campagnes, ce sont des mouvements religieux populaires qui émergent. Les sociologues des religions les appelles Nouveaux Mouvements Religieux, pour les distinguer d’une part des pratiques shinto, qui ont été agglomérées et qui sont devenues religion d’état, et d’autre part des différents types de bouddhisme.

A l’intersection des deux, va très vite apparaître un besoin pour un christianisme japonais. Un christianisme débarrassé de ce que certains perçoivent comme des éléments doublement étrangers. Etranger au Japon, mais également étranger à la culture biblique originelle, qu’ils découvrent en lisant le texte biblique directement.

Uchimura Kanzō, le fondateur du mouvement sans église, l’un des premiers de ces mouvements à se structurer, écrit par exemple que le christianisme japonais est « le christianisme reçu par les Japonais directement de Dieu, sans le moindre intermédiaire étranger ; ni plus, ni moins ». (1)

Et c’est là, d’une certaine manière que commence l’histoire des Makuya, puisque c’est dans ce contexte que nous rencontrons son fondateur : Ikurô Teshima.

Né en 1910 à Kumamoto, dans le sud du pays, sur l’île de Kyushu, il se convertit au christianisme à l’âge de douze ans après être allé dans une église baptiste avec sa sœur. Il est formellement baptisé en 1927, et après avoir finit ses études à l’école de commerce de Nagasaki (aujourd’hui intégrée à l’université de Nagasaki), il commence à fréquenter le mouvement sans église.

En 1945, il revient à Kumamoto, et s’occupe de différents business. Il organise un groupe d’étude biblique avec ses employés (ce qui à l’époque est une pratique assez courante dans les entreprises où les chrétiens sont nombreux) et publie différentes revues.

L’année charnière est 1948. Après avoir protesté contre la destruction d’une école par les autorités américaines qui occupent alors le Japon, Teshima craint d’être arrêté. Il prend le maquis, et se réfugie dans la campagne sauvage, non loin de Kumamoto, sur le mont Aso. Il y reste près d’un mois, mangeant la nuit dans une auberge située non loin de là, et se cachant dans la montagne la journée.

Fatigué, seul, terrifié à l’idée d’être capturé, Teshima passe beaucoup de temps à prier. Un jour il rapporte avoir eu une expérience spirituelle très forte, au cours de laquelle il a entendu une voix profonde en lui qui cite un verset d’Isaïe.

Teshima s’engage auprès de Dieu à faire ses œuvres, et redescend de la montagne. Ce soir-là, selon l’histoire rapportée, la police militaire est partie dans un autre secteur. Teshima était libre de revenir : on était début mai 1948.

A ce moment-là, Teshima démarre un nouveau groupe d’études bibliques, et suit le style du mouvement sans église : il enchaîne les cours, analyse les textes. C’est deux ans plus tard, lors d’une retraite avec ses élèves, qu’il va connaître une autre expérience spirituelle.

La situation internationale est mauvaise : la guerre de Corée vient d’éclater. Les troupes américaines présentes sur le territoire japonais sont en alerte. La population craint d’être entraînée dans une nouvelle guerre régionale. La Corée se trouve à moins de deux cents kilomètres des côtes de Kyushu.

Lors de la retraite organisée, Teshima, frustré de voir que son enseignement semble au point mort, connaît un moment de désespoir intense et se met à prier à haute voix. Ses élèves le rejoignent. Et peu à peu l’expérience les transforme. Ils comparent cela à la Pentecôte décrite dans l’évangile.

Et c’est effectivement le chemin que le groupe va prendre à partir de là. Teshima change le nom du mouvement et l’appelle désormais Makuya, un mot dont les idéogrammes (幕屋) signifient littéralement « la pièce aux rideaux » (en français le mot approprié dans le contexte serait en réalité « tentures »), et qui traduit le mot hébreu « ohel », le tabernacle construit par les Israélites dans le désert et au sein duquel Moïse rencontrait la présence divine.

A partir de là, les sociologues des religions placent le mouvement Makuya comme étant un mouvement pentecôtiste, mais également comme étant un mouvement qui s’enracine dans la culture japonaise populaire, à l’image des Nouveaux Mouvements Religieux, avec qui il partage une approche plus émotionnelle qu’intellectuelle et en s’adressant à des strates de la société beaucoup plus diverses que l’élite urbaine qui continue à être la catégorie la plus attirée par le christianisme.

Notre sujet n’étant pas une étude de la théologie ou de la pratique Makuya, intéressons-nous maintenant à leur lien avec Israël.

Dès le début, Teshima considère, à l’instar de Uchimura Kanzō, dont il fréquentait le mouvement, que le christianisme tel qu’il a été amené par les occidentaux est trop… occidental. Ce qu’il veut, c’est retrouver le christianisme originel, tel que vécu par les apôtres. Et pour cela, il ne voit qu’une solution : demander aux Juifs. Or voilà que la même année que Teshima a eu son expérience sur le mont Asso, l’état d’Israël a été recréé. après avoir disparu pendant près de 1800 ans. Pour Teshima, la portée de cet événement est universelle : il s’agit là de l’accomplissement de la promesse des prophètes qu’un jour les Juifs reviendront sur leur terre.

En 1954, Teshima rencontre un Israélien dans le train, le professeur Israel Slominitzky, professeur à l’université hébraïque de Jérusalem dans le département d’agriculture, et membre du kibboutz Beit Alfa (affilié à la Shomer Hatzair, le mouvement communiste, farouchement antireligieux). Ils deviennent amis : c’est le premier pont avec Israël.

En 1961, Teshima entreprend un long voyage. Il se rend en Inde, en Grèce, aux USA et en Israël. Là, il rencontre, entre autre, le philosophe Martin Buber, qui aura une grosse influence sur sa pensée, notamment parce qu’il lui fait découvrir le hassidisme, et Hugo Bergman, qui est le doyen de l’université hébraïque de Jérusalem. Il rencontre également Tsvi Yehoudah Kook, dont la pensée, qui voit dans la renaissance d’Israël le début de l’accomplissement des promesses prophétiques va également jouer un rôle central chez Teshima.

L’année d’après, Teshima envoie plusieurs de ses élèves étudier en Israël, afin qu’ils étudient avec le peuple de la Bible et qu’ils apprennent de lui l’amour de leur pays, pour servir de modèle à une nouvelle forme de patriotisme japonais.

Il intègre également des pratiques spécifiques. Les enfants célèbrent une cérémonie religieuse d’accès à l’âge adulte à treize ans, et les Makuya remplacent le symbole de la croix par celui de la ménorah, qu’ils considèrent comme plus authentique. Les adhérents prennent aussi souvent un nom hébraïque pour montrer leur attachement à Israël, en jouant parfois avec les sonorités japonaises et les idéogrammes.

En juin 1967, la guerre éclate. Les armées arabes encerclent Israël. Pendant quelques jours, les Juifs du monde entier tremblent et craignent une deuxième Shoah. Les puissances occidentales ne sont pas toutes au rendez-vous pour soutenir l’état hébreu.

Teshima est bouleversé. Il envoie aussitôt un télégramme à ses élèves en Israël : « restez aussi longtemps que vous pouvez et aidez Israël ». Il assemble une équipe de dix volontaires : un seul, Shlomo Ono, parviendra jusqu’au pays et sera blessé.

La guerre est courte, elle dure du cinq au dix juin. Le douze, Teshima parvient enfin à entrer en Israël. Il se rend aussitôt à Jérusalem : la partie Est de la ville a été libérée de la Jordanie, qui l’occupait depuis la guerre de 48. Le quartier juif avait été détruit, les synagogues brûlées, et l’accès aux lieux saints interdits aux Juifs.

Le mont du Temple est désormais à nouveau accessible : le mur occidental est ouvert à tous. Teshima s’y rend aussitôt, et comme de coutume, glisse une prière sur un morceau de papier entre les pierres millénaires : « The God of Abraham, the God of Isaac, the God of Jacob and our God, I thank for the promise and His truthfulness of the God of David. Ikuro Teshima, Tokyo, Japan ».

En septembre de la même année, le KKL inscrit Teshima dans son grand livre d’or pour le remercier de son soutien.

En 1971, lors du pèlerinage des Makuya à Jérusalem, pèlerinage qui est désormais devenu annuel, Teshima déclare : « nous croyons avec ferveur que l’Israël post-1967 est ce que Dieu a promis à notre père Abraham ». [cité par The Australian Jewish Times, 71/03/04].

En 1972, une nouvelle crise éclate. Le 30 mai, à l’aéroport de Lod, qui est alors le principal aéroport du pays, trois membres de l’armée rouge japonaise commettent un attentat au nom du Front Populaire de Libération de la Palestine. Vingt-six personnes sont tuées, quatre-vingt sont blessées. Deux des attaquants sont tués par les forces de police, le troisième est arrêté.

En Israël, l’émotion est immense. La stupeur aussi : comment ce pays à l’autre bout du continent asiatique se retrouve-t-il mêlé avec les ennemis d’Israël ?

Teshima décide d’agir dès qu’il apprend la nouvelle. Il demande à son fils, qui termine ses études au Jewish Theological Seminair de New York, d’emprunter de l’argent en anticipation des fonds qu’ils vont lever, et de prendre aussitôt l’avion pour venir l’apporter à Jérusalem.

Jacob Teshima se charge de l’opération, et va rejoindre son père en Israël, manquant ainsi la cérémonie de graduation qui marque la fin de ses études. Le deux juin, Teshima décrète un jeûne pour l’ensemble de la communauté Makuya. L’idée que des ressortissants japonais aient commis ce massacre lui est insupportable : il craint que ce soit une tâche dans les relations entre les deux pays. Et il n’a pas tord. Pendant très longtemps, la première chose que les Israéliens mentionnaient lorsqu’on leur parlait du Japon, c’était le massacre de Lod et ses trois terroristes.

En Octobre, Teshima vient à Jérusalem accompagné d’une délégation Makuya et d’un cadeau : avec les fonds collectés, ils ont acheté une ambulance pour l’aéroport. Sur le tarmac, il prononce un discours : « For each of those who died here on that infamous night, Prof. Teshima said at the ceremony, may this vehicle of mercy save many lives. For each of the wounded, may it provide to others the critical minutes which make the difference between cure and infirmity, between life and death. » (Bnei Brit Messenger, January 5)

L’année d’après, une nouvelle guerre éclate. Le six octobre, jour de Yom Kippour, les armées arabes lancent un nouvel assaut contre l’état hébreu. L’armée israélienne parvient à repousser les armées, mais on passe près de la catastrophe : l’arme nucléaire était prête à être utilisée.

A nouveau, Teshima et les Makuya font ce qu’ils peuvent. Le huit octobre, Teshima envoie une lettre à l’ONU pour protester de l’agression.

La guerre conduit au premier choc pétrolier : pour punir les pays occidentaux d’avoir soutenu Israël, les pays de l’OPEP font monter le cour du pétrole, qui passe de 3 à 12 dollars, soit une augmentation de 300%. Aucune économie ne peut résister : en occident, c’est la fin brutale des trente glorieuses. Au Japon, le gouvernement est forcé de reconsidérer sa politique au Moyen Orient et se réoriente de façon à être pro-arabe.

Teshima ne tolère pas que son pays abandonne Israël. Il organise une manifestation où plus de trois mille personnes vont marcher à travers Tokyo pour protester contre cette nouvelle politique.

Akira Jindo, le secrétaire général de l’organisation, explique : « We support Zionism from the biblical stand point, not politically, We are very much concerned with the Japanese Government’s decision to take a pro-Arab stand and want to voice our protest. » Il ajoute : « We are essentially a religious group, not a political one. But in, the face of certain wrongs, we cannot keep silent » (Australian Jewish News, 73/12/21).

Une nouvelle levée de fonds est organisée et les Makuya envoient 25 000$ au Magen David Adom, l’équivalent israélien de la croix rouge (l’équivalent de 153 220 $ en dollars de 2021 dollars, avec une inflation moyenne de 3,85% selon le site dollartimes.com).

Le vingt-quatre décembre de cette année, Teshima, épuisé, rend son dernier souffle. Il est enterré à Kumamoto. Sur sa tombe, est placée une pierre de Jérusalem, une de ces pierres à la couleur dorée qui symbolise la ville depuis deux millénaires.

A ce moment-là, on estime que le mouvement Makuya comporte soixante mille membres et cinq cents groupes d’étude biblique.

1975 marque une nouvelle étape dans le conflit israélo-arabe. Voyant que l’option militaire ne fonctionnait pas (quatre guerres en trente ans, quatre victoires israéliennes), les stratèges arabes et leurs alliés décident de changer de terrain. Désormais, c’est au niveau des institutions qu’ils vont entreprendre de saper la légitimité de l’état hébreu.

A commencer par le forum international par excellence : l’ONU. La première manœuvre consiste à proposer une résolution à l’assemblée générale. Le texte détermine que « le sionisme est une forme de racisme et de discrimination raciale ».

La proposition est tellement énorme, et tellement fausse qu’on s’attendrait à ce qu’elle soit rejetée dans un grand éclat de rire. Mais la logique numérique de blocs fait que le camp anti-Israélien est plus nombreux : la résolution est adoptée à 72 voix contre 35 (dont la France), et 32 abstentions (dont le Japon).

La réaction de l’ambassadeur israélien, auprès de l’ONU, Haim Herzog, ne se fait pas attendre. Lors de son allocution, le même jour, il explique : « I can point with pride to the Arab ministers who have served in my government; to the Arab deputy speaker of my Parliament; to Arab officers and men serving of their own volition in our border and police defense forces, frequently commanding Jewish troops; to the hundreds of thousands of Arabs from all over the Middle East crowding the cities of Israel every year; to the thousands of Arabs from all over the Middle East coming for medical treatment to Israel; to the peaceful coexistence which has developed; to the fact that Arabic is an official language in Israel on a par with Hebrew; to the fact that it is as natural for an Arab to serve in public office in Israel as it is incongruous to think of a Jew serving in any public office in an Arab country, indeed being admitted to many of them. Is that racism? It is not! That … is Zionism. »

Et après avoir conclu, il prit la résolution et la déchira.

Ce jour-là, l’ONU se décrédibilisée pour longtemps. Moins de trente après la shoah, accuser le seul état juif au monde, un état où tous les citoyens sont traités à égalité, de pratiquer le racisme et l’apartheid relève du mensonge pur et simple.

Les réactions d’indignations sont très timides. Les Makuya décident de se faire entendre. Jacob Teshima, le fils de Ikuro Teshima, écrit une lettre au secrétaire général de l’ONU qui commence par une citation d’Isaïe (II, 3-4) : « Et nombre de peuples iront en disant: “Or çà, gravissons la montagne de l’Eternel pour gagner la maison du Dieu de Jacob, afin qu’il nous enseigne ses voies et que nous puissions suivre ses sentiers, car c’est de Sion que sort la doctrine et de Jérusalem la parole du Seigneur.” Il sera un arbitre entre les nations et le précepteur de peuples nombreux; ceux-ci alors de leurs glaives forgeront des socs de charrue et de leurs lances des serpettes; un peuple ne tirera plus l’épée contre un autre peuple, et on n’apprendra plus l’art des combats. »

Et la lettre de préciser, pour les fonctionnaires internationaux un peu endormis : « the above-quoted words of an ancient Jewish prophet are, in part, inscribed on the stone monument by the United Nations building. »

La lettre est accompagnée de trente-six mille signatures collectées dans plusieurs pays où les Makuya sont actifs, et transmise à Kurt Waldheim, le secrétaire général de l’ONU. On découvrit par la suite que ce dernier, antisémite notoire, avait été officier de la Wehrmacht. L’histoire ne se répétait pas : dans les couloirs de l’ONU, elle ne faisait que se prolonger.

L’ONU répondit laconiquement que copie de la lettre serait faite et distribuée aux différentes personnes concernées.

La résolution ne sera abrogée qu’en 1991.

Les Makuya, en plus de leur activisme en faveur d’Israël, ont continué à tisser des liens avec le pays. Le pèlerinage annuel continua après la mort de Teshima et ne fut suspendu que deux fois, en 2020 et en 2021, pour cause de Covid.

En 1975, les Makuya demande au KKL la permission de planter une forêt en mémoire de Teshima. Une première forêt est plantée en Galilée, dix mille arbres dont certains viennent du Japon et doivent passer par une quarantaine stricte.

En 1984, la maison d’édition des Makuya publie le premier dictionnaire japonais / hébreu. Il contient 17 000 mots courants.

Et en 1988, ils acquièrent la maison qui deviendra le centre Makuya de Jérusalem. Le centre comprend un dortoir pour les étudiants qui viennent étudier à l’université hébraïque, dont le campus est situé à quelques arrêts de bus.

Dans le hall d’entrée on a installé une guirlande de petites grues en origami, offerte par l’école primaire du quartier. Les enfants israéliens ont même écrit un message en japonais : gambate nihon ! (Japon, tiens-bon!)

L’amitié entre les deux pays n’en est qu’à ses débuts.


Notes

(1) Dans Indigenous Christians movements, p. 153

Bibliographie

Général (sur les religions au Japon)
Handbook of Christianity in Japan, Brill Academic Pub (2003), Mark R. Mullins
Handbook of East Asian New Religious Movements-Brill Academic Pub (2018), Lukas Pokorny, Franz Winter

Sur les Makuya
Christianity made in Japan, a study of indigenous movements-University of Hawai’i Press (1998), Mullins, Mark (En particulier le chapitre six : Japanese Versions of Apostolic Christianity).
Japanese Religion: Unity and Diversity, Wadsworth Publishing (1982), H. Byron Earhart
Religions of Japan in Practice, Tanabe, George (éditeur), 1999, Princeton University Press. (En particulier le chapitre 37, qui traduit de longs extraits de la biographie de Teshima).

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