Opération Epées de fer – Journal d’un civil (12) Médias

Médias.

Aujourd’hui, visite du président américain. Il est resté à peine quelques heures, et j’ai beau lire les nouvelles, je me demande encore si c’est du lard ou du cochon.

Le hezbollah avait menacé d’ « une journée de colère sans précédent » : elle n’a pas eu lieu. Et pendant ce temps, les réseaux sociaux et la presse sont occupés à mentir et à fabriquer une histoire qui ressemble aux anciennes accusations de meurtre rituels, ces moments de psychose collective durant lesquels des foules accusaient le groupe de Juifs de la région d’empoisonner les puits ou de tuer les enfants chrétiens afin d’utiliser leur sang pour des rituels.

Les figures classiques de l’antisémitisme ne sont jamais loin. On a l’impression qu’elles ont toujours en évidence sur les tables de nos ennemis, toujours prêtes à réapparaître à la moindre occasion.

En l’occurrence, la polémique du jour concerne un hôpital de Gaza. Tout le cycle de l’indignation et la rectification se sont déroulés pendant la nuit, du coup je découvre tout post facto.

Les faits sont simples : il y a eu une explosion dans la zone d’un hôpital. Le hamas dit aussitôt qu’Israël a bombardé une cible civile et qu’il y a cinq cents morts. Comment sont-ils arrivés à ce nombre ? Comment savent-ils que c’est Israël qui a tiré ? Aucune importance, les médias du monde entier reprennent l’information, comme ça, brute, sans aucun travail de vérification. Si le hamas le dit, c’est que ça doit être vrai.

Seulement voilà : ce n’était pas vrai. Il semble que ce soit une rocket qui ait été tirée depuis une zone proche de l’hôpital par une autre faction islamiste : le Jihad Islamique. Ce sont des seconds couteaux, mais ils disposent d’un certain armement, et sont capables de faire des actions importantes.

Les gens demandent des preuves : Tsahal les donne. D’autres analysent les images, d’autres encore essayent de déconstruire l’événement. Tout le monde semble arriver à la même conclusion : ça n’était pas l’armée de l’air israélienne.

Ce n’est pas grave. Le poison est déjà parti et il s’est répandu dans un système qui n’attendait que ça pour se mettre en branle. Comme le résume lapidairement un de mes contacts sur Twitter : « Too late. The system is « structurally » anti-Israel. »

Elle a raison. Il s’est bâti peu à peu à partir des années 2000, à partir de la conférence de Durban, qui a relancé l’idée que Israël était un état qui pratiquait l’apartheid. Pour quiconque connaît ce qu’a été l’apartheid sud-africain, et pour quiconque est déjà venu en Israël plus de trois minutes et demie, cela relève du comique troupier. Mais l’idée s’est infiltrée partout.

Au point que cela semble toucher toutes les grandes instituions occidentales. Harvard vient de perdre un de ses gros donateurs pour ne pas avoir condamné fermement les attaques du hamas alors qu’un groupe d’étudiants signait une pétition en sa (presque) faveur.

La BBC se couvre de ridicule en refusant d’employer le terme « terroriste » pour désigner les gens du hamas, parce qu’ils veulent rester neutres et ne pas donner l’impression de prendre parti.

Toutes les grandes ONG sont du même calibre. Voir par exemple les communiqués d’Amnesty International.

Quant à la presse dite « de référence », elle ne manque pas une occasion de montrer son biais sélectif, quel que soit le côté de l’Atlantique. Le New York Times, coutumier du fait, a changé trois fois le titre et le chapô de son article alors que l’histoire de l’hôpital était en train d’évoluer.

1ère version : Israeli strike kills hundreds in hospital, Palestinians say. At least 500 dead in Gaza attack, as Biden prepares to visit Israel.

2ème version : At least 500 dead in strike against hospital, Palestinians say. Israelis say misfired Palestinian rocket was cause of explosion.

3ème version : At least 500 dead in blast at Gaza hospital, Palestinians say.

Comme si le hamas était une source crédible, et comme s’ils avaient pu faire le compte des victimes aussi rapidement. Sans compter le fait que le lendemain, l’image de l’hôpital en question parlait d’elle-même. L’hôpital semble en bon état : c’est le parking qui a été endommagé.

Le lendemain, ils ont titré, comme pour se dédouaner : « After hospital blast, headlines shift with changing claims. The fast-moving events highlitghed the difficulty of covering the war between Isarel and Hamas.»

Il s’est passé un phénomène assez étonnant depuis le commencement de la guerre. La première semaine, tout le monde nous soutenait. Puis il y a eu une inflexion vers le vendredi/samedi de la semaine dernière (13/14 oct.), au moment où l’armée a demandé aux habitants d’évacuer Gaza City. La machine de propagande médiatique s’est mise en marche. Il s’agit de faire oublier ce qu’il s’est passé le sept octobre et de renverser le récit : l’agresseur devient l’agressé, et Israël le coupable. Le tour de passe-passe est connu, il est habituel. Ce qui m’étonne le plus c’est qu’il ait mis une semaine à s’activer.

Et qu’il semble venir majoritairement des grandes institutions : les universités, les médias principaux, les ONG et les partis politiques sur le déclin.

En dehors de toutes ces instituions occidentales fatiguées, et dont le seul but est devenu leur propre survie, les gens de base, en occident, sont plutôt favorables à Israël. De même les politiques occidentaux qui semblent soutenir, même s’ils sont empêtrés dans toutes les contradictions qu’ils ont eux-mêmes créées au fil des années en voulant ménager la chèvre et le chou. Voilà qu’il devient probant que le hamas est une organisation terroriste, dans son ensemble, que son but explicite est génocidaire et que des organisations de ce type se trouvent disséminées dans beaucoup d’autres régions du monde.

Revenons à Biden, qui arrive sur ces entrefaites, comme une fleur un peu fatiguée après un vol de douze heures. Arrivé vers 11 heures, reparti vers 18h30. Entre temps il a rencontré le premier ministre, Binyamin Netanyahou, et le cabinet de guerre, ainsi que le président de l’état, Isaac Herzog (élu pour un septennat non-renouvelable). Mais les dirigeants arabes, qu’ils soient de l’autorité palestinienne, de la Jordanie ou de l’Egypte, ont décliné de le recevoir, signe que les Américains perdent de l’influence dans tout le Moyen Orient.

La photo de son arrivée résume tout : Netanyahou et Biden se donnent une accolade, que la presse israélienne a qualifié d’ « embrassade de l’ours » (hibouk dov), c’est-à-dire une étreinte un peu serrée qui n’est pas forcément toujours très amicale. On en trouve un exemple dans la Genèse, lorsque Esav et Jacob se rencontrent à nouveau. Jacob avait dû fuir Esav et se réfugier au loin pendant plusieurs années : la scène se passe alors qu’il rentre enfin au pays, et que son frère vient à sa rencontre avec plusieurs centaines de soldats. Enfin ils se rencontrent et tombent dans les bras l’un de l’autre. Mais l’embrassade en question est pleine d’ambiguïté : est-ce la tentation d’en finir ou la réconciliation des frères ?

Les avis sont partagés. D’un côté les Américains semblent nous soutenir, d’un autre, ils ont beaucoup contribué au problème auquel nous devons maintenant faire face en étant en première ligne.

Biden reparti, la guerre risque de prendre un nouveau tournant. Attendons la suite, et espérons le meilleur.